
Tube en acier 304 et risque de corrosion lié aux conditions de stockage température humidité.
L’acier 304 inoxydable présente un comportement de résistance à la corrosion relativement bon, mais qui va varier selon des paramètres intrinsèques (composition, microstructure) ou extrinsèques (température, milieu, …). Cet article précise les facteurs de corrosion, les différentes formes de corrosion et la manière de les éviter.
Un alliage inoxydable

L’acier 304 fait partie de la famille des aciers inoxydables qui ont pour propriétés d’être résistant à la corrosion et ainsi éviter l’apparition de rouille. Le chrome est l’élément d’alliage indispensable dans l’acier et sa teneur doit être supérieure à 12 %. On peut alors se demander la raison d’être de la large gamme de nuances d’aciers inoxydable disponibles (304, 316, ferritique, austénitique, …, Duplex) s’il suffit d’ajouter 12 % de chrome. Cela s’explique par le fait qu’aucun de ces aciers n’est complètement inoxydable car chaque nuance résiste à un ou plusieurs types de corrosion. Le choix de la nuance d’acier va alors se faire selon l’environnement auquel va être exposé le métal et les contraintes mécaniques lors de son usage. L’acier 304 est la nuance la plus répandue parmi les aciers inoxydables représentant plus de 50 % de la production mondiale. Les deux éléments d’addition principaux sont le Chrome (entre 18 % et 20 %) et le Nickel (entre 8 et 11 %) qui ont une forte influence sur la résistance à la corrosion.

Influence de la teneur en chrome

Pour comprendre l’importance de la teneur en chrome, il est utile de rappeler son mécanisme et le rôle qu’il joue. Sous l’effet de la présence d’oxygène, le chrome en extrême surface va diffuser puis réagir avec l’oxygène pour former une couche Cr2O3 selon la réaction 4Cr + 3O2 -> 2Cr2O3. Cette couche d’oxyde qu’on appelle couche passive va imperméabiliser l’acier contre l’air et les agressions ultérieures du milieu extérieur.
Contrairement à un revêtement, cette capacité à construire une couche passive permet à l’acier 304 de se « reprotéger » malgré une détérioration de la surface (rayure, choc, …). Cette couche passive peut être renforcée par une étape de passivation. Cette étape permet, par apport d’oxygène via généralement des bains d’acide nitrique, de densifier et d’épaissir la couche passive pour augmenter encore la résistance à la corrosion. Il est cependant nécessaire que la surface soit propre de toute pollution pour obtenir une bonne passivation homogène. Ce nettoyage doit être fait de manière rigoureuse pour éviter une couche passive hétérogène et doit suivre plusieurs étapes spécifiques en particulier dans le domaine aérospatial, nucléaire et santé.
Facteurs de corrosion

Malgré cette protection de la couche passive, l’acier 304 peut se corroder. Quatre facteurs peuvent participer à l’apparition de la corrosion : le milieu environnant, le matériau, la conception de la pièce et enfin le temps. Dans la plupart des cas, c’est la conjonction de plusieurs facteurs qui entraine la corrosion. Il est toujours nécessaire de rechercher les éléments pouvant être présents comme le chlore, l’humidité, le PH, la composition chimique ou la présence d’inclusions, …, pour comprendre l’origine de la corrosion.
Corrosion de l’acier 304
Il est assez rare que l’acier 304 soit soumis à une corrosion généralisée et uniforme. Ce type de corrosion peut arriver dans un environnement très sévère (milieu très acide, température élevée) ou à cause d’une non-conformité grave du matériau. La nuance 304 va plutôt être sujette à des formes de corrosion localisées comme la piqûre, la corrosion caverneuse, intergranulaire ou bactérienne.
Corrosion par piqûre

La corrosion par piqûre (pitting corrosion) est une forme de corrosion très localisée formant de petites cavités en surface généralement accompagnées d’une auréole de couleur marron due à la formation de rouille en surface. Ce défaut est initié par des éléments de pollution extérieure, en générale le chlore et le souffre, qui vont venir attaquer la zone de la couche passive la plus faible (irrégularités, inclusions non métalliques, …).. Le métal n’étant plus protégé, une cavité va alors se former puis se développer par le fond de la piqûre du fait de réactions électrochimiques qui ne sont pas bloquées par la repassivation. Une première estimation de la résistance à la piqûration peut être faite via la composition de la nuance et le calcul du PREN (Pitting Resistance Equivalent Number).

Le PREN est une formule établie de manière empirique dont l’équation est la suivante : PREN = 1 × %Cr + 3.3 × (%Mo + 0.5 × %W) + 16 × %N. Cette équation n’écarte pas la nécessité d’un essai de corrosion pour confirmer la bonne résistance à la piqûration d’un acier. L’un des essais pratiqués pour mesurer la résistance à la piqûration est l’immersion de l’échantillon dans une solution de chlorure de fer en suivant les spécifications présentes dans la norme ASTM G48. Cet essai permet de comparer la sensibilité à la piqûration entre des métaux.
Corrosion caverneuse

La corrosion caverneuse forme des cavernes aux endroits où la concentration en oxygène est la plus faible comme les espaces confinés ou des zones de la pièce contenant de l’eau. L’appauvrissement local en oxygène va créer une zone anodique générant ainsi un mécanisme de micro-pile qui augmente dans cette zone l’acidité et la concentration de Chlore par un phénomène de migration. Des corrosions peuvent alors apparaître dans les interstices entre des pièces en contact ou sous des dépôts comme des joints en caoutchouc et des dépôts organiques. Des essais de laboratoire pour évaluer la sensibilité à la corrosion caverneuse d’une pièce de nuance 304 peuvent être utilisés. Par exemple l’essai sous eau chlorée présent dans la norme ASTM G78 permet, par mesure de perte de masse, de connaître la résistance de la pièce à la corrosion caverneuse.
Corrosion intergranulaire

La corrosion intergranulaire se forme aux niveau des joints de grains et est causée par la présence de précipités comme le carbure de chrome Cr23C6, les phases intermétalliques, …. Ces précipités vont localement appauvrir fortement le taux de chrome qui peut ainsi descendre en dessous de 12 %, minimum requis pour protéger l’acier 304 et ainsi permettre la propagation de la corrosion entre les grains. La présence de ces carbures peut être dû généralement à une mauvaise élaboration de l’acier, à une température de fonctionnement trop élevée ou bien à la présence d’une ZAT (Zone Affectée Thermiquement) lors d’une opération de soudage.
L’utilisation d’un acier très bas carbone comme le 304 L (Low carbon) permet d’éviter l’apparition de corrosion intergranulaire. Des essais de laboratoire permettent de connaître la résistance à la corrosion intergranulaire d’une pièce de nuance 304. L’essai Huey, par exemple, consiste à plonger la pièce dans un bain contenant une solution nitrique à ébullition puis de mesurer la perte de masse en surface. La procédure de l’essai est détaillée dans la norme ASTM A262.
Conclusion
On comprend bien qu’aucun acier inoxydable est réellement « inoxydable » et tout particulièrement l’acier 304. Il s’avère que cette condition d’inoxydabilité est un équilibre entre les 4 facteurs présentés et de multiples paramètres intrinsèques (lié au métal) ou extrinsèques (environnement extérieur). Bien évidemment, certaines nuances permettent d’obtenir une résistance à la corrosion plus élevée mais elles restent pour autant oxydables si les facteurs nécessaires sont réunis. Tout l’enjeu est de trouver la bonne association entre le matériau et son milieu. Des essais de corrosion permettent de déterminer la sensibilité de la pièce aux différents types de corrosion et des analyses métallographiques permettent de trouver le type de corrosions qu’a pu subir la pièce.
Le CTIF réalise des nombreuses prestations de service en rapport avec les problématiques de corrosion : essais de corrosion normalisés, expertise de pièces corrodées (dont expertise judiciaire), assistance au choix de la meilleure nuance, …, optimisation de tracé de pièce et des projets de R&D.
Bonjour,
Excellent documentaire, nonobstant l’approche d’analyse des causes qui en principe doit respecter les 5 facteurs qui sont : le milieu, la matière, la main d’œuvre, moyen ou machine , méthodes. Il est très important lors d’une démarche d’investigation d’analyse de cause que ces différents facteurs soient pris en considération.
Merci et continuer à nous proposer des documentaires sur l’acier inoxydable c’est un matériau extraordinaire.
Bonjour Mohamed et merci de votre lecture attentive de notre article de MetalBlog sur l’acier inoxydable 304. Pour répondre à votre commentaire sur la démarche 5M, nos Experts de CTIF possèdent une « grille de lecture » et un retour d’expérience qui leur permet de remonter aux causes de non qualité après analyse de pièces(micrographie, MEB, radiographie, …) et si besoin intervention sur site de production pour expertiser les paramètres de fabrication.
Très intéressent, merci d’avoir partagé.
Bonjour et merci de votre intérêt pour nos articles de MetalBlog et pour celui sur l’acier 304 plus spécifiquement.
une colonne de douche qui est en acier inoxydable 304 est acceptable pour l’utilité qu’on va en faire.
Est ce que ca peut devenir corrosif après un certain temps.
Merci
Bonjour Yvon et merci de votre question. L’utilisation du 304 comme élément de douche va dépendre de qualité de l’eau (présence de chlore, acidité (PH), dureté de l’eau) mais aussi de son environnement. Ainsi, cet acier à l’intérieur d’ une maison dans un climat tempéré ne pose pas de problèmes. Par contre, l’utilisation du 304 pour une douche ouverte de type camping dans un climat tropical ou à proximité de la mer pourrait présenter des risques de corrosion.