La fonte moulée en coquille

fonte en coquille - coulée

fonte en coquille - coulée

La fonte en moulage coquille, même si elle présente de multiples intérêts (absence de sable, précision dimensionnelle, …) est relativement inhabituelle. Ainsi, en France, alors que de très nombreuses fonderies pratiquent le moulage sable, la société New Die Casting (Rochefort) réalise des pièces en fonte en moulage coquille.

Histoire de la fonte en moule permanent

fonte de boulets de canon en moulage coquille.
fonte de boulets de canon en moulage coquille.

La production de la fonte en moule métallique n’est pas récente car déjà au XVe siècle, on produisait des boulets de canons en fonte dans des moules métalliques en deux parties. Il y a également près d’un siècle, en 1920, les carburateurs en fonte de la Ford Model « T » étaient produits en grande série en fonte en coquille par la société Holly Corp. En 1930, cette compagnie fut vendue à la Eaton Corporation (Michigan) qui développa le procédé et le fit connaître. D’où le nom de « procédé Eaton » utilisé quelquefois pour désigner le moulage de la fonte en coquille. Ensuite, pendant la guerre froide, de nombreux pays du bloc soviétique utilisèrent assez massivement cette technologie y compris pour la production de très grosses pièces (de plusieurs centaines de kg).

La production en Europe de fonte en coquille

En Europe, dans les années 2000, environ 6 % de la production de fonte aurait été réalisée par coulée gravité en coquille, très majoritairement en Europe de l’Est (République tchèque, Slovaquie, Pologne, Hongrie, Bulgarie, et pays de l’ex-union soviétique) pour une production annuelle estimée à 650 000 tonnes. On peut penser, au vu des restructurations industrielles importantes dans ces pays, que ce tonnage a sensiblement évolué. Dans le reste de l’Europe (excluant l’Europe de l’est et les pays de l’ex union soviétique), la coulée en coquille était utilisée dans 15 fonderies qui produisaient annuellement 35 000 tonnes. Dans le reste du monde, quelques fonderies produisent également par ce procédé (quelques fonderie aux USA, 6 fonderies au japon pour 18.000 t/an, 1 fonderie au Canada, 1 fonderie au Brésil, 2 fonderies en Chine et Malaisie et 2 fonderies en Inde).

Le principe du moulage de la fonte en coquille

Le moulage en coquille consiste à couler par gravité la fonte dans un moule métallique où elle se solidifie. Les chantiers sont, comme pour le moulage coquille de l’aluminium, soient en ligne soient composés de carrousels. Le procédé de moulage en coquille convient bien à des pièces de moyenne ou grande série, faiblement complexes (peu noyautées) et de faible taille (quelques kilos en général). Les fontes moulées en coquille sont en général des fontes à graphite lamellaire et plus rarement des fontes à graphite sphéroïdal.

Les avantages du procédé

Fonte en coquille.
Production de fonte en coquille sur carrousel – New Die Casting (Rochefort).

La coulée en coquille apporte des avantages incontestables. Tout d’abord, l’usinabilité est fortement améliorée. En effet, par rapport à une fonte grise coulée en sable, la fonte en coquille, grâce à sa structure 100 % ferritique et à ses lamelles de graphite très fines, permet des gains sur les opérations d’usinage (vitesse d’avance importante, moindre usure des outils). Ensuite, l’étanchéité des pièces est accrue. La composition hyper-eutectique provoque une expansion graphitique à la solidification, qui liée à la non déformation du moule conduit à une plus forte compacité des pièces. Enfin, la stabilité dimensionnelle des pièces est liée au traitement thermique (détensionnement des contraintes résiduelles) et au moulage en moule métallique. Signalons également que le procédé est très intéressant du point de vue environnemental car l’absence de sable supprime les problématiques de HAP, de traitement et de recyclage du sable.

Le moule métallique

Fissurations sur moule.
Fissuration de moule de fonte en coquille – chocs thermiques.

Les outillages sont presque toujours en fonte grise moulée (graphite de type A). Ils peuvent également être en fonte sphéroïdale ou en acier moulé, mais ces derniers choix techniques sont plus rares. En général, le moule est monobloc et le plan de joint est vertical. Cette disposition est la plus fréquente pour les petites et moyennes pièces. C’est celle qui se prête le mieux également à la mécanisation. C’est celle qui laisse également la plus grande latitude quant au choix du mode d’alimentation.

Ce mode de construction est toutefois difficile à mécaniser dès que le poids de la coquille dépasse quelques dizaines de kilos. Le moule est très sollicité par chocs thermiques en surface. Sa durée de vie, très variable, est de quelques centaines de coulées pour les grosses pièces (200 kg à 4 tonnes) jusqu’à 15 000 coulées environ pour les plus petites pièces (< 5 kg).

Le refroidissement du moule

Pour assurer une durée de vie du moule convenable et la rentabilité du process, il est fortement conseillé de refroidir la coquille et d’éviter les points chauds. Le refroidissement du moule peut être réalisé de trois façons : par air (le plus fréquent) avec de l’air comprimé ou à l’aide d’ailettes (ou de picots) de refroidissement à l’arrière du moule, par eau avec des circuits internes (rare) ou par pulvérisation d’air humide (rare).

Moule avec refroidissement.
Moule avec refroidissement à air par ailettes (ou picots) sur face arrière du moule.

Le refroidissement à l’air permet un refroidissement « doux », qui a une certaine efficacité de transfert de chaleur pour les pièces minces. Il est bien moins efficace en revanche pour les pièces épaisses. Le refroidissement est réalisé par de l’air comprimé ou encore des ailettes ou des picots de refroidissement positionnés sur les faces opposées aux parties moulantes. Le refroidissement à l’eau peut utiliser différents design. Tout d’abord, on peut utiliser une « chambre à eau » soudée à l’arrière du moule. La chambre à eau peut être également intégrée dans le plateau de la machine, sur lequel on vient plaquer le moule. Ce refroidissement est alors un peu moins efficace que le précédent car il est indirect. Le principal inconvénient est le risque d’une lame d’air entre le moule et ce plateau machine refroidi, qui diminuera alors l’efficacité et l’homogénéité du refroidissement.

Moule avec refroidissement à eau
Moule avec refroidissement à eau dans chambre à eau dans le moule.

Enfin, des circuits de refroidissements traversant peuvent être placés dans le moule, positionné dans les zones chaudes du moule. Ces circuits peuvent être obtenus par perçage ou par insertion à la coulée de tubes en acier dans un moule en fonte. Il existe également des refroidissements par vaporisation ou spray. Dans cette dernière technologie, toutefois peu utilisée, des passages verticaux sont prévus dans le moule, au-dessus desquels sont positionnés manifold et buses pour pulvériser de l’eau. L’énergie de changement de phase (vaporisation de l’eau) vient alors «consommer» les calories du moule. Ce système, très efficace, est toutefois moins uniforme, et peut alors causer des gradients et des chocs thermiques préjudiciables à la durée de vie du moule.

Le poteyage en surface de moule

Le moule est revêtu d’un enduit réfractaire, appelé poteyage, qui a plusieurs fonctions : créer une barrière thermique entre le moule métallique et la fonte coulée afin d’éviter les chocs thermiques trop violents (pour prolonger la durée de vie du moule), éviter le collage du métal d’autre part et enfin éviter la migration du soufre du métal liquide vers la coquille. Le poteyage est généralement constitué de 2 couches. La première couche protectrice joue le rôle de barrière thermique. Il s’agit souvent d’un revêtement semi permanent à appliquer régulièrement.

La seconde couche est un lubrifiant, très souvent contenant du carbone qui est déposé à la surface du moule avant chaque coulée. La coquille est ainsi enduite très fréquemment de noir de fumée provenant d’une flamme d’acétylène pure. Le but de cette couche très mince et peu tenace est à la fois de faciliter le démoulage, mais également d’isoler le moule et de fournir des germes de graphitisation pour ainsi ralentir drastiquement la vitesse de solidification et éviter la formation d’une zone superficielle blanche.

Le type de pièces réalisées en moulage coquille

Les pièces réalisées sont assez diverses. Elles se caractérisent généralement par l’absence de noyaux internes. Le moulage coquille est plus particulièrement destiné à la production de pièces de série de 0.5 kg à 50 kg. On peut cependant, comme évoqué précédemment, mouler des pièces allant jusqu’à plusieurs centaines de kilos (voir plus rarement quelques tonnes). Les pièces produites par ce procédé sont des composants de freins pour automobile, des pièces de compresseur d’air (cylindres et vilebrequins), des composants hydrauliques, des éléments de robinetteries (types raccords ou coudes …), des cylindres de roues de freinage, des corps de compensateurs, des corps de pompe à essence ou fuel, des vilebrequins de compresseurs frigorifiques, des plaques à clapets, des paliers, poulies, des corps de distributeurs hydrauliques… ou enfin des bâtis de machine (machines à imprimer les journaux) pour les plus grosses pièces.

Le tracé des pièces

Le tracé des pièces destinées à la coulée en coquille doit tenir compte du fait que, lors de la contraction au refroidissement, la coquille ne cède pas sous la sollicitation de la pièce comme le fait le moule en sable. Elle a, au contraire, tendance à se dilater. Il convient donc d’éviter les reliefs susceptibles d’ancrer la pièce dans l’empreinte et de s’opposer au retrait. Les angles de dépouilles doivent être aussi généreux que possible et en tout cas supérieur à 3°. La précision dimensionnelle est meilleure que celle obtenue en moulage sable du fait de l’utilisation d’un moule métallique.

Un procédé intéressant

On l’aura compris, le moulage en coquille ne peut pas s’appliquer à la majorité des pièces en fonte. Ce procédé est cependant intéressant du point de vue technique mais également environnemental par l’absence d’utilisation de sable de fonderie.

7 commentaires

  1. KESSLER dit :

    Qu’en est-il au niveau du préchauffage de la coquille? Température?

    • Le CTIF dit :

      Bonjour Laurent. Bonne question car il est toujours délicat de parler de température qui varie fortement dans un cycle et entre la surface (interface moule/métal) et le cœur du moule (ou la face externe) surtout en moulage coquille d’alliage ferreux. En règle générale la température de la coquille doit être d’autant plus élevée que la pièce à produire est plus mince. A l’interface, en fin de solidification, on atteint ponctuellement de 450°C à 750°C (fonction du ratio Volume pièce/volume moule). Les températures moyennes sont plus faibles et sont autour de 250°C à 450°C. Un préchauffage du moule de l’ordre de 250°C semble raisonnable.

  2. Laurent KESSLER dit :

    Donc préchauffage de la coquille à 250°C environ…
    Ensuite effectivement en fonction du profil de la pièce et de la coquille les variations de température fluctuent.
    Pour ce qui est du poteyage, ce sont les mêmes que pour l’aluminium je suppose avec une application identique aussi, je pense pas qu’il y ait de raison de changer cela…

  3. Bonjour,

    Non les poteyages ne sont pas les même que l’aluminium. Pour le préchauffage, 150-200°C pour démarrer suffisent, en cycle de fabrication on arrive ensuite à une stabilisation qui dépend de plusieurs paramètres (refroidissements, fréquence, géométrie de pièce, etc…). Cela marche aussi sur la fonte GS…

  4. Erwan BRAU dit :

    Bonjour, je voudrais savoir quelles sont les systèmes de préchauffage que vous utilisez pour votre moule ? Est-ce les bruleurs? Mon but serait de savoir s’il d’autres technologies aussi efficaces et moins polluantes existent pour préchauffer le moule ? Peut être un chauffage par induction ?

    • Le CTIF dit :

      Bonjour Erwan et merci de cette intéressante question sur le préchauffage des moules métalliques. Il existe plusieurs technologie en fonderie pour préchauffer les outillages métalliques : brûleurs a gaz, système de canaux de thermorégulation (Huile, eau), cartouches chauffantes électriques, induction, … Si toutes sont théoriquement applicables, en pratique, seules les 2 premières sont utilisées. Notre article de MetalBlog sur la thermique des moules en fonderie sous pression pourra sans doute vous intéresser également :
      https://metalblog.ctif.com/2018/03/26/optimiser-la-thermique-dun-moule-metallique/

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