
Les nouveaux alliages métalliques.
Les nouveaux alliages se développent en parallèle avec les autres familles d’alliages plus traditionnelles (fonte, aluminium, acier, …). Bien qu’ils ne représentent à ce jour qu’une part de marché très faible, ils sont pour certains à haute valeur ajoutée, en croissance et permettent d’adresser des marchés spécifiques (spatial, médical, …). Cet article fait le point sur ces différentes familles de nouveaux matériaux que sont les CMM (Composites à Matrice Métallique), les intermétalliques, les alliages ductiles en fonderie sous pression, les alliages à mémoire de forme, les alliages bimétalliques, les verres métalliques, les alliages à haute entropie (HEA), les CCA (Complex Composition Alloy) et les alliages développés spécifiquement pour la fabrication additive métallique (SLM, …).
Les composites à matrice métalliques (CMM)

Les composites à matrice métalliques (CMM) sont des matériaux associant une base métallique (aluminium assez classiquement) à un renfort de céramique (5 % à 20 % environ) soit sous forme de fibres courtes ou longues, soit sous forme de particules de petites (20-50 µm) ou de plus grosses tailles (millimétriques). Le CMM le plus connu historiquement a été le Duralcan, soit un alliage d’aluminium AlSi7Mg dopé en SiC (initialement développé par Alcan). Les CMM offrent souvent un compromis entre leur structure métallique (tenue au choc, facilité de mise en forme, …) et leur renfort en céramique (tenue à l’usure, …). Récemment, est apparu des imprimantes 3D capables de mélanger des particules de métal et de céramique (par laser cladding) , ce qui pourrait accélérer le développement des CMM.
Les alliages intermétalliques

Les alliages intermétalliques sont des composés métalliques dont les éléments d’alliage sont dans des rapports stœchiométriques correspondants toujours à des rapports de concentrations atomiques simples (½-½, ⅔-⅓, ½-¼-¼) en raison d’une structure cristallographique ordonnée. L’intérêt principal de ces composés réside dans la conjugaison d’une résistance mécanique à haute température (s’approchant de celle des céramiques) et d’une aptitude à l’écrouissage propre aux métaux. Ils présentent, en outre, le plus souvent un haut point de fusion, une faible diffusivité et une certaine légèreté (dans le cas des différents aluminiures). Le TiAl est devenu l’alliage intermétallique le plus connu, attirant le plus le regard des concepteurs (essentiellement de réacteurs d’avion). Le Ti-48Al-2Cr-2Nb est ainsi devenu la référence en la matière. Il existe cependant de nombreuses autres familles d’intermétalliques (Fe3Al, FeNi, …) en développement.
Les alliages ductiles en fonderie sous pression

Alors que les alliages conventionnels utilisés en fonderie sous pression (AlSi9Cu3, AlSi12) sont souvent très limités en tenue mécanique (allongement, Rp0,2), une nouvelle famille d’alliage d’aluminium dite à haute ductilité (et à bas fer et plus haute teneur en manganèse) est apparue. Ces alliages (de type AlSi10MnMg) permettent de réaliser des grandes pièces de structure pour l’industrie automobile. La faible teneur en fer autorise le traitement thermique mais nécessite une santé interne importante et l’utilisation d’une technologie de sous vide (< 100 mbar dans l’empreinte de coulée). Ces alliages sont principalement destinés au marché automobile mais pourraient avoir d’autres débouchés.
Les alliages à mémoire de forme

Les alliages à mémoire de forme (ou AMF) présentent la particularité de retrouver leur forme initiale après une déformation. La clé physique du phénomène de mémoire de forme repose sur une transformation structurale de type martensitique réversible. Les deux principales familles de ces nouveaux alliages à mémoire de forme sont les bases nickel-titane (dont le Nitinol) et les bases cuivre. Ces AMF sont utilisés dans l’industrie biomédicale (implant, prothèses, agrafes orthopédiques, …, stents), l’aéronautique, l’horlogerie (ressort dans le mécanisme d’une montre), …, ou encore l’énergie (amélioration des performances de batterie lithium-ion).
Les alliages bimétalliques

Les alliages bimétalliques sont des assemblages de deux alliages. L’objectif étant d’utiliser un alliage noble (et donc souvent couteux) là où il est réellement nécessaire et utile pour la fonction de la pièce (en zone de corrosion ou pour réaliser un renfort mécanique) et de mettre un alliage plus traditionnel (et donc moins couteux) dans le reste de la pièce. Différentes technologies permettent de réaliser des assemblages bimétalliques : l’insertion à la coulée, le laser cladding, le FSW (qui permet de souder des matériaux de composition hétérogènes) ou encore l’infiltration d’une structure lattice (en acier par exemple) issue de fonderie ou de fabrication additive par un alliage à plus bas point de fusion (aluminium par exemple). Les volants automobiles en magnésium injecté en fonderie sous pression (avec un insert acier) ou les blocs moteurs en AlSi9Cu3 avec surmoulage de chemises en fonte sont ainsi deux exemples bien connus de bimatériaux largement utilisés.
Les verres métalliques (AMA)

Les verres métalliques, encore appelés Alliages Métalliques Amorphes (AMA) sont dotés d’une structure amorphe (désordonnée) plutôt que cristalline. Ces matériaux sont en général obtenus par refroidissement très rapide depuis l’état fondu de l’alliage. La combinaison d’un état métallique et d’une structure amorphe, confère à ce type de matériau une association unique de propriétés mécaniques, électriques, magnétiques et de résistance à la corrosion avec une possibilité de mise en forme directe depuis l’état liquide. Aujourd’hui, si leur maîtrise reste encore pointue (transformation sous vide) et leur coût important, ils permettent de réaliser de petites pièces aux performances mécaniques exceptionnelles (Rm de l’ordre de 3000 MPa) pour des applications à haute valeur ajoutée : boîtiers extra-fins de téléphone cellulaire, scalpels, boîtiers de montres, faces de frappe de club de golf, raquettes de tennis, batte de baseball.
Les alliages à haute entropie (HEA)

Les nouveaux alliages à haute entropie ou HEA (pour High Entropy Alloy) sont des composés où aucune base (fer, cuivre, …, ou aluminium) n’est majoritaire. Dans la définition « officielle » d’un HEA, un alliage doit contenir au moins 5 éléments majeurs à égalité de composition et des éléments mineurs en plus faible quantité. Le concept des HEA date de 2004. Le premier HEA développé a été l’alliage de Cantor (CoCrFeMnNi à 20 % chacun). Depuis, les CCA (Complex Composition Alloy) dérivés des HEA se sont développés. Les CCA sont des matériaux multiphasés à solution HEA. La spécificité des HEA et des CCA vient de la forte distorsion du réseau cristallin, de la diffusion atomique très ralenti (stabilité thermique des matériaux) et d’une très bonne stabilité de la solution solide. Il existe au moins 5 familles de HEA (FeNiCrCoVMn, Ni Hf W Ta, Mn Mg …, métaux précieux Pt Or … et enfin lanthanide) mais les 2 premiers sont les plus importants. Les applications visées sont la tenue à haute température ou en atmosphère ou milieu très agressif (aéronautique, énergie, nucléaire, …).
Les nouveaux alliages pour la fabrication additive
La fabrication additive métallique (SLM, laser cladding, …) se développe très fortement (taux de croissance de 20 % /an environ en 2018) pour les pièces prototypes, pour les outillages ou pour les petites séries (aéronautique, médical, …). Cependant, alors que l’effort de développement a été mis principalement sur le développement des machines d’impression 3D, cette technologie fait appel le plus souvent à des poudres identiques en composition (Inconel 718, Inox 316L, AlSi10Mg, TA6V, …) aux alliages issus des technologies traditionnels (fonderie, forge, …). Ces compositions traditionnelles ne sont pas optimisées pour ce nouveau procédé d’impression 3D (très forte vitesse de solidification, grains très fins, …). Aujourd’hui, on voit ainsi apparaitre de nouveaux alliages (A20X, …, Ti-42Nb, Scalmalloy Al-Mg-Sc) spécifiquement développés pour la fabrication additive. A termes, on peut penser que la fabrication additive bénéficiera d’une gamme d’alliage sur mesure.
Les outils de développement des nouveaux alliages

Pour développer ces nouveaux alliages, les métallurgistes couplent souvent les essais expérimentaux (élaboration, mise en forme, caractérisation) à une approche d’Alloy Design numérique (de type approche CALPHAD, algorithme génétique, machine learning ou approche ab-initio, …) et à leur expertise propre liée à la connaissance du domaine et de l’influence des éléments d’alliage et des impuretés sur le comportement à l’état liquide (facilité de mise en forme) et sur les propriétés fonctionnelles après solidification. De plus, à la limite de plusieurs disciplines métallurgiques (alliage ferreux, alliage non ferreux), le développement des nouveaux alliages semble fortement tiré en avant par la fabrication additive métallique et par la possibilité de réaliser des batch de poudre de faible quantité pour des productions sur mesure.
Conclusions
Les nouveaux alliages sont constitués de nombreuses familles (verre métallique, HEA, alliage intermétallique, bi matériaux, ….) assez différentes. Encore assez onéreux (par leurs éléments d’alliages, …, leur mise en forme), ces nouveaux matériaux, encore en développement pour certains et à faible TRL, sont réservés aujourd’hui à des secteurs à haute valeur ajoutée (luxe, aéronautique, …) où ils apportent des propriétés fonctionnelles spécifiques. Ces nouveaux matériaux ne sont clairement pas amenés à se substituer aux matériaux traditionnels (aluminium, acier, fonte, …) comme l’aluminium n’a pas remplacé l’acier ou la fonte. Si ces nouveaux alliages constituent actuellement des niches (en termes de chiffre d’affaires), certains familles pourraient à l’avenir prendre une part de marché plus importante si leur coût de fabrication les rendait accessible à des marchés de masse (automobile, électroménager, …). Enfin, l’impression 3D métallique booste le développement de ces nouveaux matériaux métalliques spécifiques.
Merci pour cet article qui m’a appris pas mal de choses utiles.
Bonjour Paul et merci de votre retour très positif. C’est l’objectif de MetalBlog que de mieux faire connaître les différentes technologies au sens large (métallurgie, procédés, …, outils de calcul) utilisées et développées au CTIF pour ses clients.
Merci pour cet article fort intéressant, ainsi que pour tous les autres parus cette année. Bravo à toute l’équipe de Métal Blog, bonnes fêtes de Noël, joyeux Nouvel An et à l’année prochaine !
Bonjour Guy. Un très grand Merci pour vos compléments qui vont nous faire rougir (à 1500°C) et nous font chaud au cœur. Nous remercions avec vous tous les auteurs pour la qualité de leurs articles et vous souhaitons d’excellentes fêtes de fin d’année.
s »il vous plait jai besoin d’un peu d’aide je cherche les aliages a memoire de forme dans l’industrie telephonique
Bonjour et très bonne question un peu pointue. Les alliages à mémoire de forme étaient utilisés anciennement pour les antennes de smartphones, mais ce marché à disparu. Il n’est pas certain que l’industrie téléphonique utilise ce matériau, mais ce marché est très dynamique et les nouveaux modèles apparaissent à un rythme soutenu, donc difficile de suivre tous les développements en cours.