
Intelligence artificielle et métallurgie, utilisation des réseaux de neurones.
L’intelligence artificielle (et les réseaux de neurones), après être restée longtemps dans les laboratoires de recherche, commence à diffuser et à avoir des applications concrètes en informatique, dans les services et dans l’industrie. Cette synthèse présente le principe des réseaux neuronaux et les applications potentielles sur des exemples développés en fonderie dans le cadre de différents projets.
Les réseaux de neurones et le machine learning

Réseau de neurones à plusieurs couches – neurones d’entrée (Input), couche caché ou intermédiaire (Hidden) et neurones de sortie (Output).
Les réseaux de neurones artificiels ou ANN (Artificial Neural Network ) consistent à reproduire de manière virtuelle l’architecture des réseaux de neurones naturels du cerveau et leur fonctionnement par apprentissage. Pour cela, on commence par bâtir une base d’apprentissage – avec les données d’entrée et les résultats à obtenir (ou données de sortie) – qui permettra d’entraîner le réseau de neurone. C’est le principe du Machine Learning qui permet ensuite au réseau de neurones de traiter des cas nouveaux pour lesquels il n’a pas été entraîné.
Les systèmes Experts

Règles logiques d’un système expert (CF = coefficient de certitude entre 0 et 100).

Système Expert DIADEM de CTIF – années 1990 – diagnostic de défauts / causes / remèdes en fonderie sous pression aluminium.
Les systèmes experts (outils plus anciens que les ANN) nécessitaient de connaître (via un expert humain) et de formaliser les règles logiques explicatives d’un process (SI « la température de coulée est trop réduite » ALORS « risque d’apparition de défaut de reprise »). Ces règles logiques sont alors combinées par un moteur d’inférence. Le système expert DIADEM de CTIF, réalisé dans les années 1990, pour le diagnostic et l’identification des causes et remèdes de défauts en fonderie sous pression aluminium, fonctionnait sur ce principe et comprenait une base de connaissance (les règles logiques proprement dites) et des bases de données internes (sur les moules, les alliages, …). Les systèmes experts fonctionnent sur une logique dite floue qui attribue un coefficient de certitude (CF entre 0 et 100) aux règles logiques, ce qui permet de moduler leur degré de véracité et évite un raisonnement binaire (métal trop chaud/métal trop froid). Cependant, dans de nombreux cas pratiques en fonderie, le nombre de paramètres (et leurs interactions) sont souvent trop importants pour formaliser aisément de telles règles. Les réseaux de neurones, qui ne nécessitent pas de formaliser de telles règles, trouvent alors tout leur sens.
Histoire du développement des réseaux de neurones artificiels
Les neurologues Warren McCulloch et Walter Pitts publièrent dès la fin des années 1950 les premiers travaux sur les réseaux de neurones et ils développèrent ensuite un modèle simplifié du fonctionnement des neurones biologiques. Cependant, dans les années 1970 et 1980 les réseaux de neurones ne se développèrent que très peu car en 1969, certains scientifiques (Marvin Lee Minsky et Seymour Papert) avaient mis en évidence leurs limitations conceptuelles. Une révolution survient alors en 1986 dans le domaine des réseaux de neurones artificiels avec de nouvelles générations de réseaux de neurones (capables de traiter avec succès des phénomènes non linéaires) comme le perceptron multicouche qui repose sur la rétropropagation du gradient de l’erreur.
Les applications de l’intelligence artificielle en métallurgie
Les applications des réseaux de neurones en métallurgie commencent à apparaître depuis quelques années. L’analyse de la littérature scientifique sur ce sujet (Manjunath Patel et Prasad Krishna) montre en effet de nombreuses études sur la prédiction des paramètres de production optimum, sur la prédiction des propriétés mécaniques à différents stades du process, la prédiction de la présence (ou l’absence de défauts) lors du contrôle des pièces, l’identification et la classification de défauts ou encore la planification de la production de pièces. On note aussi des études touchant au calcul du prix des pièces à l’étape du devis, la prédiction des microstructures ou la diminution des défauts à la solidification.
Les logiciels de simulation de réseau neuronaux
Les logiciels du commerce les plus utilisés pour générer des réseaux de neurones sont Matlab, Matlab Neural Network Tool et Statistica Neural Network Software. On peut également utiliser des logiciels libres (Rochester connectionist simulator, NeurDS, PlaNet 5.7, GENESIS 2.0, SNNS 4.1, Atree 3.0 educational kit for windows,…). En fonderie, la plupart des réseaux de neurones développés utilisent un réseau multicouche de perceptron (MLP) en raison de sa bonne capacité de généralisation.
Prédiction de défauts en moulage sable

Fonderie de sable – prédiction de l’apparition de différents types de défauts par un réseau de neurones.
Dans une fonderie de fonte en sable à vert (Inde), un réseau de neurones (avec une couche de neurones cachés comprenant 23 neurones) a été généré (MATLAB Software) pour prédire l’apparition de défauts sur pièces à partir de 11 paramètres d’entrée (4 liés au sable et 7 liés à la composition chimique et conditions de coulée). Le paramètre de sortie pour l’entraînement est la présence (1) ou l’absence de défauts (0) mais le résultat ensuite est une probabilité d’apparition de défaut entre 0 et 1. Il a été utilisé 65 jeux de données d’entrée et 19 jeux de données de tests (issues de 4 types de pièces différentes) pour valider les résultats. La prédiction est globalement bonne en particulier pour l’apparition de criques et de mal-venues. Cependant, les auteurs (Ganesh G. Patil, Dr K.H. Inamdar) mentionnent que la prédiction des porosités gazeuses est moins bonne, sans doute liée à un trop faible nombre de données d’entrée.
Prédiction de micro-retassures dans une fonderie en Espagne
Des travaux de R&D (Igor Santos, Javier Nieves) menés dans une fonderie espagnole ont permis de bâtir un modèle de prédiction des micro-retassures sur des supports de disque de frein en fonte FGS pour l’industrie automobile (45 000 t/an). Ce modèle, développé sur 2 types de pièce, tient compte de 24 paramètres de production et intègre 4 niveaux de risques d’apparition de défauts internes (de 0 « aucun risque de défauts » à 3 « très fort risque de défauts »). Le réseau de neurones artificiels à 3 couches ; 24 neurones dans la couche d’entrée, 15 neurones en couche intermédiaire et 4 neurones en couche de sortie. La phase d’apprentissage a nécessité d’entrer les paramètres de production de 951 pièces (support de disques de frein) et le niveau de qualité (radiographie et contrôle ultra-sons). Les données d’entrée, au nombre de 24, comprennent des variables métal (composition, inoculant, température), des variables moule (type de sable, paramètres de moulage) et enfin des variables liées aux dimensions et à la géométrie des pièces. Les résultats semblent assez concluants (85 % de fiabilité), même s’ils ne sont pas parfaits car le modèle prédictif n’atteint pas les 100 % de fiabilité. Les auteurs du papier vont investiguer d’autres types de défauts de pièce.
Prédiction des propriétés mécaniques de pièces en fonte
Dans la même fonderie que précédemment, un réseau de neurones a été testé pour prédire les propriétés mécaniques (Rm) à partir de 25 variables de production (composition chimique, vitesse de refroidissement, traitement thermique) et 11 références de pièces différentes totalisant 889 données d’entrée possibles. Différentes tailles (100, 200, …, 800) de lots d’apprentissage ont été testés avec à chaque fois 66 % des pièces utilisés en apprentissage et 33 % utilisés en phase de test des performances de prédiction. Les meilleurs résultats en termes de réduction d’erreur de prédiction ont été obtenus avec un grand nombre de données (entre 700 et 800), mais pas avec la totalité de la base d’apprentissage.
Prédiction de comportement d’un alliage de magnésium en fonction de sa composition et de la vitesse de refroidissement

Influence de la composition chimique et de la vitesse de refroidissement sur la taille grain, le RP0.2 et la dureté.
Un réseau de neurone a été développé (L.A. Dobrzanski et M. Król) pour prédire les caractéristiques (Rp0.2, dureté et taille de grain) d’alliages de magnésium (Mg-Al-Zn) en fonction de la composition chimique et de la vitesse de refroidissement (0.6, 1.2 et 2.4 °C/s). Les auteurs ont utilisé 75 % des données expérimentales pour la base d’apprentissage et 25 % pour la base de tests avec 8 neurones d’entrée, 6 neurones cachés et 3 neurones de sortie. Il est noté que les résultats de prédiction sont très bons pour la résistance mécanique et la dureté et acceptable pour la taille de grain. Les propriétés mécaniques dépendent ainsi fortement de la vitesse de refroidissement et de la teneur en aluminium. La dureté, quant à elle, augmente avec la teneur en aluminium et décroit légèrement avec la vitesse de refroidissement.
Composite à matrice métallique en métallurgie des poudres
Des composites à matrice métallique AlCuMg / B4Cp avec un renforcement allant jusqu’à 20% en poids et produits par la métallurgie des poudres ont fait l’objet d’un modèle de réseau neuronal artificiel (Temel Varol et Aykut Canakci) pour prédire les effets des paramètres de fabrication (durée du broyage, pression de compactage, …) sur la densité et la porosité des composites AlCuMg / B4Cp. L’erreur en pourcentage absolu moyen n’excède pas 1,6 %.
Prédiction de la modification du silicium pour un alliage Al-Si-Cu

Performance du réseau de neurone pour prédire la modification d’un alliage d’aluminium AlSi7Cu3.
Les points de transformation du diagramme d’analyse thermique d’un alliage AlSi7Cu3 avec différentes teneurs en strontium (de 8 à 96 ppm) ont été utilisés (R. Francis et J Sokolowski) pour prédire le niveau de modification au strontium (SiML pour Silicon Modification Level selon l’ASM) qui varie de 1 à 6.
Les résultats sont relativement bons avec une base d’apprentissage limité à 47 échantillons.
Importance de la base de d’apprentissage
La qualité des réponses d’un réseau de neurones dépend beaucoup de la qualité (absence de redondance,…) et la quantité de données utilisées pour l’apprentissage. Or, pour obtenir des résultats assez fiables, il peut être nécessaire d’utiliser jusqu’à 1000 données d’entrée. Si dans certains cas, on utilise des données expérimentales déjà disponibles ou facilement accessibles, d’autres méthodes utilisent des données calculées issues de plan d’expérience expérimentaux ou des données issues de simulation numérique du process (remplissage/solidification). Ces données numériques ont le mérite de coûter moins cher que des essais expérimentaux, de pouvoir être facilement générées et d’inclure moins d’erreurs.
Utilisation de données issues de la simulation numérique

Réseau de neurones pour prédire les résultats de coulée continue.
La simulation numérique peut ainsi générer facilement un grand nombre de jeux de données qui serviront à alimenter un réseau de neurones pendant la phase d’apprentissage. Ainsi, dans le process de coulée continue de l’acier (logiciel de simulation de laboratoire) avec 6 paramètres d’entrée, on a pu utilisé plus de 24 000 jeux de données d’apprentissage (Tadej Kodelja). Les librairies de réseau de neurones Aforge.Net et NeuroDotNet ont été utilisées.
Utilisation de données issues d’un plan d’expérience

Réseau de neurones en squeeze casting aluminium avec base d’apprentissage générée par les résultats d’un plan d’expérience.
Des surfaces de réponses issues de plans d’expériences expérimentaux peuvent aussi être utilisées pour réaliser l’apprentissage d’un réseau de neurones. Comme pour la simulation numérique, cette méthode présente l’avantage de pouvoir générer un très grand nombre de jeux de données d’entrée à faible coût. Ainsi, pour le process de squeeze casting d’un alliage d’aluminium, les auteurs (Manjunath Patel Gowdru Chandrashekarappa et ali) ont procédé de cette façon pour prédire la densité et le DAS de l’alliage à partir de 5 paramètres process (température du moule, température de coulée, pression de squeeze, durée de la pression et délai avant application de la pression). Ils ont ainsi généré 1000 données d’entrée.
Le futur de l’intelligence artificielle dans la métallurgie
En raison du grand nombre de paramètres d’entrée, du caractère souvent non linéaire de ces paramètres et des surfaces de réponses souvent complexes, la métallurgie offre un vaste champ d’application aux réseaux de neurones. Le plus délicat est sans doute de pouvoir extraire une base de données pertinentes pour la phase d’apprentissage. En effet, il suffit bien souvent qu’un paramètre très influent (la température de coulée, l’épaisseur de pièce, la teneur en carbone, le taux d’humidité du sable, …) soit oublié pour que la qualité des réponses fournies soit médiocre ou ne puisse pas se généraliser à d’autres cas. De ce point de vue, la simulation numérique du process permet de générer off line une base d’apprentissage importante et semble être une solution intéressante. On peut mentionner aussi le fait que de nombreux outils de génération de réseaux de neurones sont distribués en opensource – et pour certains issus des travaux des GAFAM – comme TensorFlow (Google), ce qui permettra leur démocratisation.
c’est trés important
Bonjour Rachid et merci de votre avis sur cet article consacré aux réseaux de neurones en métallurgie.
c’est un sujet treés important pour moi,est ce que je pourai avoir plus d’informations car j’ai un projet similaire de fonderie fonte gs et gl a utilisé en reseau de neurone.
Bonjour,
Nous Mr TALEB ABDELAZIZ Chef de département informatique & transformation numérique snvi epe spa for, je tiens toujours à vous informer que j’ai un projet d’intégrer inintelligence artificielle dans le domaine de fonderies et collaboration des chercheurs universitaires ,des stagiaires et nos ingénieurs et techniciens de notre fonderie.
Mon contact est d’être soutenue et conseiller par des personnes de CETIF comme vous.
PHONE:00213 561612116
Bonjour Taleb et merci de votre intérêt pour notre article de MetalBlog
Bonjour Taleb et merci de ces informations.